Dans ma pratique, je rencontre régulièrement des gens qui sont accusés de harcèlement. Vous savez ce que la plupart me disent?
Voyons donc, je ne l'ai jamais harcelé!
Ce n'est pas du harcèlement. C'est à croire que je ferais du harcèlement...
Évidemment, je rencontre tout autant des victimes et vous savez ce qu'ils me disent?
Je ne peux pas croire que je suis me suis laissé faire. J'aurais jamais pensé accepter cela!
Peu importe que nous soyons accusés de harcèlement ou que nous en soyons la victime, on n'aurait jamais cru être impliqué dans cette problématique. C'est un peu comme lorsqu'on voit des gens ayant été victimes de fraude, on se dit tous... "comment ils ont pu être aussi naïfs, comment ils ont pu tomber là-dedans, moi ça ne me serait jamais arrivé..."
Dans ma formation "Harcèlement psychologique et droit de gérance: la ligne est parfois mince", je présente les fondements du harcèlement et je peux vous dire que peu de gens se reconnaissent dans les comportements qui s'apparent au harcèlement. Peu de gens pensent même être un jour impliqués dans une telle problématique. "Ce n'est pas pour moi, jamais je ne vivrai cela..."
Depuis l'entrée en application en 2004 de la Loi des Normes du Travail encadrant la problématique du harcèlement , les cas sont en hausse constante année après année.
Pourtant, la loi et les politiques et procédures obligeant les entreprises à prendre les moyens nécessaires et possibles pour offrir à tous les employés un climat de travail sain, agréable et exempt de harcèlement ne devaient pas avoir comme but de réduire l'ampleur du problème?
Plusieurs raisons peuvent expliquer cette hausse:
Les gens sont moins tolérants...
Il est probablement vrai que les gens sont moins tolérants... et c'est une bonne chose. On ne doit plus tolérer des comportements agressifs, intimidateurs et manipulateurs. Les gens sont davantage sensibilisés à la problématique. On en entend davantage parler. Les cas sont davantage médiatisés.
La dénonciation est rendue plus facile avec le mouvement "MeToo"...
Ça demande encore une bonne dose de courage pour dénoncer un collègue ou un patron. Toutefois, les entreprises, depuis janvier 2019, sont dans l'obligation d'avoir une politique de prévention et gestion des cas de harcèlement psychologique et sexuel. Il est donc plus facile aujourd'hui, pour une victime, de dénoncer des comportements de harcèlement.
La surdénonciation: Le manque de connaissance des gens par rapport à ce qu'est réellement le harcèlement...
Si vous saviez le nombre de fois qu'on me dit être victime de harcèlement, mais qu'en réalité, ce que les gens vivent ce sont des conflits ou un droit de gérance qui passe mal. Les gens confondent beaucoup harcèlement, conflit, incivilité et droit de gérance. Les enquêtes de recevabilité permettent de déterminer si nous sommes en présence d'un cas potentiel de harcèlement ou si la plainte est frivole (preuve manquant d'étoffe) ou pire encore, malveillante (faite pour contrôler ou faire du tort à une personne).
La vraie raison? Le harcèlement est sournois et subtil...
Il faut comprendre que le harcèlement est souvent une conséquence d'une dynamique malsaine entre deux individus. Cette dynamique s'installe tranquillement, subtilement et souvent sournoisement. Cette dynamique progresse en intensité avec le temps, avec l'acceptation de la victime de certains comportements et la désensibilisation de la partie mise en cause (harceleur) vis-à-vis la victime. La partie mise en cause aura tendance à banaliser ses actions.
Vous pensez ne jamais tomber dans le piège de cette dynamique néfaste ?
Voici deux petits questionnaires qui peuvent vous aider à savoir s'il est possible que vous subissiez du harcèlement dans votre milieu de travail (premier questionnaire) ou que vous soyez susceptible de commettre du harcèlement vis-à-vis une personne de votre environnement (deuxième questionnaire).
Suis-je susceptible de subir du harcèlement ?
Question 1: Dans mon environnement, est-ce qu'il y a une personne qui m'empêche de prendre ma place?
Question 2: Est-ce que je dois régulièrement collaborer avec cette personne?
Question 3: Est-ce que cette personne semble chercher à me prendre en défaut devant les autres en soulignant mes erreurs ou en remettant en question mes compétences et mon jugement?
Question 4: Est-ce que cette personne vous démontre ouvertement son impatience et son intolérance?
Question 5: Est-ce que vous avez tendance à vous laisser faire en vous disant que ce n'est rien et que ça va passer?
Si vous avez répondu "oui" à la plupart de ces questions, il est possible que vous soyez dans une dynamique malsaine dans le rôle de la victime. Avant que la situation s'intensifie, je vous recommande d'en discuter avec une personne digne de confiance et bien aux faits de la situation.
Suis-je susceptible de faire du harcèlement?
Question 1: Dans mon environnement, il y a une personne dont j'ai beaucoup de difficultés à tolérer?
Question 2: Est-ce que je dois régulièrement collaborer avec cette personne?
Question 3: Est-ce que vous avez beaucoup de difficultés à respecter ses compétences, ses idées et opinions ?
Question 4: Est-ce que vous avez tendance à réagir verbalement ou par votre non verbal à sa présence ou ses interventions ?
Question 5: Est-ce que cette personne à tendance a ne pas réagir à vos comportements et commentaires?
Si vous avez répondu "oui" à la plupart de ces questions, il est possible que vous soyez dans une dynamique malsaine dans le rôle du harceleur. Avant que la situation s'intensifie, je vous recommande d'en discuter avec une personne digne de confiance et bien aux faits de la situation.
En conclusion, si vous pensez être à l'abri, vous êtes à risque. Soyez-en conscient et remettez en question vos dynamiques difficiles qui peuvent devenir malsaines. Le harcèlement vous guette subtilement et sournoisement. Le harcèlement, c'est un problème pour les autres, tant et aussi longtemps que nous n'en faisons pas partie...